…une complète Réévaluation de l’Historie de l’Europe“?, 2010

« … Une complète réévaluation de l’Histoire de l’Europe ? »

Evolution, tendance et problématique d’une culture du souvenir en Europe1

 

Günter Morsch

 

Sous le titre « Célébrer l’année 1989 c’est aussi se rappeler l939 ! » a été publié cette année  dans un grand hebdomadaire interrégional, à l’initiative,  entre autre, de la Déléguée fédérale aux archives de l’ancienne Sécurité d’Etat de la RDA et de son prédécesseur, un communiqué qui a été signé par de nombreuses personnalités parmi lesquelles, étonnamment, de nombreux historiens appartenant à la gauche libérale2. Or le titre laisse penser qu’il s’agit pour les initiateurs d’inviter à n’oublier en aucun cas, au milieu de l’avalanche d’activités multimédia diverses  qui au plus tard depuis le début  de 2009 à l’occasion du 20ème anniversaire de la chute du Mur se sont abattues sur nous, le non moins important 70ème anniversaire du début de la Deuxième Guerre Mondiale.

Pourtant les lignes qui suivent déçoivent déjà ceux qui sans doute ont espéré un tel signe.

Il s’agit en effet d’une déclaration au sujet du 70ème anniversaire  du pacte germano-soviétique du 23 août 1939. Le texte contient de nombreuse phrases sensibles, justes et différenciées sur la signification historique du pacte entre les deux dictateurs. Or l’orientation en matière de politique du souvenir liée à cette déclaration n’est introduite pour ainsi dire qu’en passant dans la dernière phrase. En avril, y est-il dit, le Parlement européen s’est reconnu pour la première fois une responsabilité dans la mise en place d’une culture du souvenir, destinée à sensibiliser les générations à venir aux développements autoritaires et dictatoriaux nouvellement apparus. Il convient de poursuivre sur ce chemin.

Bon gré malgré, nous devons admettre que les signataires de cette déclaration savent à quelle orientation d’une politique du souvenir ils ont avec leur signature signifié leur assentiment. Cependant on ne peut s’empêcher de constater que même le petit nombre des experts qui en Europe se consacrent au souvenir et à la commémoration, ont pris connaissance jusqu’à présent de cette étonnante, importante et parfaitement exemplaire résolution du Parlement européen.

 

Juste à temps avant de nouvelles élections, le Parlement européen a en avril 2009 pris la décision de faire du 23 août le jour de la commémoration des victimes des régimes totalitaires et autoritaires3. La résolution introduite en particulier par les parlementaire baltes, tchèques et polonais des fractions démocrates chrétiennes, libérales et nationales et promulguée, ce qui n’est certainement pas un hasard, sous la présidence du Ministre-président Václav Klaus, demande entre autre « une nouvelle évaluation de l’histoire européenne » . « L’Europe », est-il dit dans cette résolution, « ne sera unie que quand elle sera en mesure de parvenir à une vision commune de son histoire, de reconnaître le communisme, le nazisme et le fascisme comme un héritage commun et de mener un débat sincère et approfondi sur tous les crimes totalitaires du siècle passé. » Pour parvenir à ce but, le Parlement européen demande « la création d’une plate-forme pour la mémoire et la conscience de l’Europe qui apporte un soutien à la mise en réseau et à la coopération des instituts de recherche nationaux dont la spécialité est l’histoire du totalitarisme, de même que la création d’un centre de documentation européen commun ou plutôt d’un mémorial européen commun pour les victimes de tous les régimes totalitaires »

 

Cette résolution, relativement complète, exhaustivement fondée, appuyée par de nombreuses déclarations de principe politiques et historiques et des déclarations politiques d’intention exigeantes, bourrée de verdicts et de jugements moraux, est d’une certaine manière l’aboutissement et le point d’orgue d’un processus de formation d’opinion au sein du parlement européen commencé en janvier 1993. En effet presque seize ans plus tôt, en février 1993, le Parlement européen avait pris une résolution en faveur de la protection européenne et internationale des sites des Camps de concentration édifiés par les Nazis comme monuments historiques4. Dans cette résolution, longue à peine d’une page, limitée à quelques points, les parlementaires, inquiets de l’avenir des monuments et Mémoriaux dans l’ex-RDA, avaient exigé la conservation de ces sites authentiques sous protection européenne et internationale. Ce faisant, dans leur déclaration quasiment unanime qui se référait à une initiative du président de l’Union internationale des prisonniers, ils rejetaient résolument « toute confusion arbitraire entre la réalité des camps nazis et leur éventuelle utilisation après la guerre » – en référence en particulier aux camps spéciaux soviétiques de Sachsenhausen et de Buchenwald.

 

 Le changement dans la culture du souvenir

 

La comparaison des deux décisions met en évidence l’énorme et profond changement qui s’est produit dans la culture du souvenir en Europe dans les dernières années. En seulement 16 ans les principes d’une politique du souvenir et les positions fondamentales sur des questions importantes se sont retournées presque en leur contraire. A mon avis on peut constater ce processus de changement au vu de deux évolutions.

En premier lieu, il semble que, contrairement à ce que craignait l’ex-ministre lettonne des Affaires Etrangères, Sandra Kalniete5 en octobre 2007,  le long chemin pour parvenir dans la culture européenne du souvenir à une certaine égalité entre le souvenir des deux dictatures est désormais arrivé à son but. En particulier l’intégration dans la culture du souvenir de l’ensemble de l’Europe de leur mémoire spécifique respective concernant l’épisode de plus de quarante années d’oppression soviétique que réclament à juste titre les nouveaux membres de l’Union européenne en Europe centrale n’est fondamentalement plus mise en doute.

En second lieu, un changement, en aucun cas de moindre importance, survenu ces dernières années, consiste dans le fait que dans de nombreux pays d’Europe et donc dans le Parlement européen une volonté toujours plus forte s’est affirmée d’unir les différentes cultures du souvenir par une nouvelle forme de politique de l’histoire sur la base d’un modèle européen commun de récit  et ainsi d’instrumentaliser le passé pour des objectifs politiques présents plus fortement et plus clairement que jusqu’à aujourd’hui. Quelles causes ont conduit  à un processus de transformation plutôt rapide dans cet espace de temps historique et quelles sont ses causes ?

 

Un nouvel « Âge de la mémoire. »

 

Déjà  au début des années 90 l’historien de la culture, Pierre Nora, a parlé d’un nouvel « Âge de la mémoire ». Cette remarquable « conjoncture de la mémoire » (Christoph Cornelißen) est qualifiée par certains historiens d’une sorte de « memory boom ». Celui-ci n’a pas lieu d’ailleurs uniquement sur le sol de l’Europe. Aux Etats-Unis comme dans beaucoup d’états sud-américains mais aussi en Corée, au Japon, au Cambodge et dans d’autres pays asiatiques, et enfin aussi dans différents pays africains, partout ont lieu des débats, particulièrement sur les conséquences de la guerre et des régimes despotiques. Pour cette raison Fabrice Larat parle d’un « marché mondial de la politique du souvenir », Andrew H. Beattie l’appelle « cosmopolitan memory », Henri Rousso fait l’analyse d’un « régime global de l’historicité », tandis que d’autres auteurs en adaptant simplement l’évolution économique des dernières années parlent d’une politique du souvenir globalisée. Comme devrait  déjà l’indiquer l’énumération des noms de quelques auteurs, il s’est développé en quelques années un propre rameau  des sciences de l’histoire et de la culture, qui entre temps a produit une foule à peine maîtrisable de publications sur ce nouveau marché mondial. Partout là où des discussions sur l’héritage des dictatures et de la violence étatique revêtent une importance sociale, partout se créent avec une étonnante rapidité des musées d’Histoire et des Mémoriaux, dans lesquels on n’évoque pas seulement les victimes, mais où l’on présente aussi les événements historiques à travers de grandes et impressionnantes expositions et où on les documente par différents media.

 

Il semble donc évident qu’avec la fin de la Guerre froide, l’effondrement des anciennes positions idéologiques de même qu’avec le développement de la communication  et de l’économie globale s’est imposé un « boom » du souvenir qui  a pénétré également les sociétés et les états. Conséquemment, des crimes passés sous silence ou maquillés sont révélés, des victimes oubliées ou discréditées sont honorées publiquement, des parents obtiennent des informations sur les tombes de leurs morts, des survivants reçoivent une tardive reconnaissance et les criminels doivent après des décennies rendre compte de leurs crimes.  Dans de nombreux pays le « memory boom » a conduit à un changement radical de la culture du souvenir et celui-ci a profité en première ligne aux Mémoriaux, qui ont bénéficié d’une attention et d’une reconnaissance jusqu’alors à peine connue. Cependant avec la fin des tabous et du silence s’est engagée simultanément une lutte sans merci pour le sens : les vieux clichés ennemis sont déformés, des déchirures apparaissent entre les groupes sociaux, ethnies et états se divisent, les victimes se font concurrence, partis et gouvernements transforment les ressentiments qui resurgissent en « politique du souvenir, politique du passé ». L’histoire devient une arme et dans les cas extrêmes, comme par exemple dans le processus de décomposition de la Yougoslavie et de l’Union soviétique, on en vient même à se tirer dessus. Indigné devant « l’héritage accablant de l’Europe », l’écrivain, prix Nobel et survivant de plusieurs camps de concentration et d’extermination, Imre Kertész écrit : « Qui aurait pu croire qu’avec  la « révolution de velours », le char du temps allait  pour les peuples d’Europe de l’Est s’élancer non en avant mais en arrière et qu’ils allaient maintenant continuer leurs jeux d’enfant là où ils les avaient interrompus en 1919 »6.

 

La résurrection des mythes nationaux, illusions et peurs, ne se limite en aucun cas aux seuls nouveaux pays adhérents à l’Union européenne, comme le montre par exemple le conflit qui ne s’est heureusement déroulé qu’avec les armes de l’histoire entre la « vieille » et la « nouvelle » Europe à l’occasion de la guerre d’Irak. C’est ainsi qu’entre la Grande Bretagne et la France on a soudain évoqué le souvenir du Blocus continental, les guerres napoléoniennes et le Congrès de Vienne pour replacer les divergences de vue sur le conflit actuel dans la supposée continuité de rivalités nationales  et ainsi les discréditer. C’est avec une particulière violence que le travail de mémoire sur les crimes réciproques commis pendant la Guerre civile déchire aussi aujourd’hui la société espagnole, encore 70 ans après la victoire des Phalangistes sous Franco. Comme autre exemple d’un processus de division déclanché par le questionnement du souvenir il faudrait citer en Belgique le débat autour de la création à Mechelen d’un musée sur le thème de la persécution des Juifs. Sur la question de savoir si « Transit Mechelen » devait être un classique « Musée de l’Holocauste »  ou un lieu où l’on traiterait l’histoire générale de la persécution et du génocide dans les siècles passés, on a vu éclater non seulement l’habituelle concurrence des victimes  mais aussi se déclencher des débats qui allaient fort loin à propos des images de l’histoire nationale et de l’identité7. Ce qui relie tous ces conflits totalement différents liés à la politique du souvenir, c’est la recherche d’un cadre d’interprétation et d’attribution de sens univoque, unifié, transnational et moralement inattaquable tout particulièrement pour les guerres et les crimes dans l’histoire du 20ème siècle.

 

L’Europe un champ de bataille ?

 

Au regard de l’augmentation du nombre de tels différents relatifs à la politique du souvenir en Europe, la tentation est proche de forcer d’en haut et par décret la constitution d’une culture unitaire de la mémoire européenne. Le politologue allemand Claus Leggewie a récemment identifié en tout sur ce qu’il appelle le « champ de bataille Europe »8 sept cercles de souvenirs transnationaux qui rivalisent entre eux pour la formation d’une mémoire collective européenne ou qui du moins doivent s’y insérer. Les deux récits modèles les plus significatifs et les plus influents y sont sans aucun doute ce qu’on appelle « Holocaust Education » d’un côté et la théorie du totalitarisme de l’autre.

 

La déclaration de Stockholm et la fondation qui s’en est suivie  d’une « Task force for International Cooperation on Holocaust Education, Remembrance and Resaerch » l’année du changement de millénaire ont reçu, ne serait-ce que par la présence de 47 chefs de gouvernement et d’autres importants représentants des états dont le président américain,  un appui inégalable. C’est « sur la base du pire » (Henry Rousso) que devrait être tentée la refondation de l’Europe. Partant de la thèse d’une singularité, le génocide à l’égard des Juifs d’Europe a été déclaré en tant que mal absolu comme le point fixe négatif d’une culture européenne et globale du souvenir. Dans un grand nombre de conférence,  des légions d’experts et de diplomates ont défini des standards pédagogico-didactiques, développé des directives pratiques pour combattre l’antisémitisme  et ont implanté, grâce à des parrainages, des musées de l’Holocauste partiellement financés par des fonds privés. Pour un large public européen c’est avant tout l’introduction du 27 janvier comme « Jour de la commémoration de l’Holocauste »  qui s’est révélé grandement efficace.

 

Mais ce qui devait être l’offre d’un consensus fondateur négatif en Europe,  est devenu pour les pays de l’Europe de l’Est, selon les mots de Tony Judt, un billet d’entrée pour l’Union Européenne. Progressivement est apparue dans ces pays une résistance croissante. On y ressentait la propre expérience de la terreur du système communiste comme plus oppressante. D’autres états d’Europe du Nord et de l’Ouest qui se trouvait plutôt à la périphérie du processus génocidaire ne se sentaient pas concernés dans leur propre mémoire nationale par l’ « Holocaust Education ». Enfin, des historiens et d’autres experts critiquent avant tout la décontextualisation du génocide, la réduction de sa causalité à l’antisémitisme, l’oblitération d’autres groupes de victimes et, avec le concept de l’universalisation d’Auschwitz, la tendance à une réduction anthropologique du fait.

 

Dans la réactivation de la Théorie du totalitarisme qui s’était largement développée au temps de la Guerre froide il y avait  en fin de compte plus que la tentative d’intégrer l’expérience historique des nouveaux états membres à la mémoire européenne.  Que les millions de victimes de la terreur communiste devaient avoir un droit à la commémoration et au souvenir dans la même mesure que les victimes du nazisme, qui voulait en douter ? Mais à la différence de l’« Holocaust Education » la Théorie du totalitarisme revendique de faire la synthèse de la mémoire du Goulag et de celle du Camp de concentration. Ici il ne s’agit pas de la comparaison scientifique légitime et même incontournable des génocides et des crimes, mais il en va, malgré tous les démentis des bonnes paroles dominicales, d’une assimilation a priori. Pendant qu’officiellement on assure ne pas vouloir confronter la souffrance des victimes pour ne pas enregistrer des victimes de première et de deuxième classe, dans le même temps on recherche des analogies historiques qui doivent prouver l’identité essentielle des crimes.  Car du point de vue des victimes, c’est ce qui est dit dans la décision du Parlement européen citée plus haut  sur la conscience de l’Europe et le totalitarisme, peu importe quel régime  et pour quelle raison on les a privés de liberté, torturés ou assassinés.

 

Stratégie de la décontextualisation

 

Quand, par exemple, on considère la destruction de Varsovie en 1944 et l’assassinat de centaine de milliers de personnes comme le pire exemple de « destruction coopérative »9 entre l’Union soviétique et l’Allemagne nazie, ou bien l’exécution des officiers polonais à Katyn par les services secrets soviétiques et le massacre de représentants de l’élite polonaise par les SS comme le résultat d’un plan commun ou tout au moins concordant, alors l’analyse du contexte historique et de ses causes fait place à un verdict moral. Il ne s’agit plus alors d’éclaircissement ou d’explication d’événements et de processus historiques mais de commémoration et de condamnation. C’est alors qu’arrachée à son contexte comme le montre clairement la citation suivante de l’historien anglais bien connu Norman Davies, dans la comparaison entre le stalinisme et le nazisme, une réévaluation des crimes peut être effectuée. Dans son livre « Au cœur de l’Europe. Histoire de la Pologne »10 Norman Davies écrit : « A la lumière du changement de cours qui a suivi on pourrait même dire que pendant cette phase (il s’agit de la période 1939-1941, G.M.) la terreur soviétique a par certains aspect surpassé celle des nazis. Le système stalinien en ce qui concerne les techniques et la logistique de la terreur avait devancé les Nazis, puisqu’il avait pendant les épurations survenues peu de temps auparavant dans le pays même, mettre sur pied l’appareil nécessaire. Pendant que les Allemands en étaient encore à mettre au point leurs préparatifs pour Auschwitz ou Treblinka, les Soviétiques pouvaient assumer sans grande difficulté l’augmentation de la population de leur « archipel Goulag » de quelques millions de Polonais et d’Ukrainiens de l’ouest. Ils préférèrent condamner leurs victimes  à une mort retardée,  lente, par la faim et le froid, tandis que les Nazis donnaient leur préférence à une élimination rapide – et qui peut dire ce qui était le plus humain, – et pourtant le résultat était le même. »Non seulement l’historien britannique largement reconnu passe ainsi sous silence toute l’histoire préalable au système des Camps de concentration, de Dachau à Buchenwald, Flossenbürg et Mauthausen en passant par Sachsenhausen, il omet aussi que la plupart des victimes de l’Holocauste ont été au vrai sens du mot abattus par des groupes d’intervention. Pour finir il se rapproche douteusement du jugement des assassins de masse sur eux-mêmes, qui se targuaient d’avoir inventé avec les chambres à gaz une forme « plus humaine » de l’extermination des hommes.

 

Une mise à égalité forcée

 

A partir de là, pour citer l’exemple du mémorial de Sachsenhausen, il est tout à fait sans importance que la mort en masse qui a emporté les détenus du camp  spécial soviétique par la faim et les maladies en raison de conditions de détention que l’on doit qualifier de criminelles, soit, en première ligne, interprétée comme le résultat d’un plan meurtrier concerté ou la conséquence  d’une typique indifférence du stalinisme à l’égard de la vie humaine  devant l’arrière-plan  d’une famine qui ravageait une grande partie de l’Europe centrale et orientale. Celui qui simplement nomme de telles différences ou même les qualifie de critères de différence se rend suspect non seulement aux yeux des organisations de victimes ou de personnes intéressées, mais encore au regard de certaines parties du public ou du monde politique.

 

La tentation de la mise à égalité est naturellement particulièrement forte dans des lieux au passé multiple. A Sachsenhausen par exemple où le camp de concentration national-socialiste qui a servi de 1936 à 1945 de centre administratif pour l’ensemble des camps ainsi que de camp modèle et de camp-école pour les SS, est devenu ensuite le plus grand camp spécial soviétique, on peut montrer de manière exemplaire que dans la durée il n’y a aucune voie qui permette une commémoration commune et transversale des victimes de dictatures différentes, qui ne rouvre des tombes et des blessures, même, ou précisément, quand il y a une intervention étatique. Dans ces conditions il est difficile pour le scientifique lui-même de résister à l’instrumentalisation et à la récupération. L’histoire aux multiples causes de la création des camps spéciaux qui n’étaient pas seulement la conséquence de la Deuxième Guerre Mondiale dont l’Allemagne a été responsable, mais aussi de la continuité de la terreur des services secrets soviétiques, de même que l’extraordinaire hétérogénéité dans la composition de la population des détenus ne permettent pas une compréhension par les modèles simplistes d’explication que souhaitent la politique et la morale. La prise de conscience de la réelle complexité des faits historiques se heurte en conséquence au besoin apparemment très fort d’un système clair et transparent de culpabilité, de jugement et de condamnation – d’un côté le camp spécial comme lieu d’internement pour les criminels nazis, de l’autre comme la branche allemande du Goulag soviétique. Le résultat, ce sont des suspicions, des insinuations, des accusations et des injures. Plus le processus de mise à égalité du souvenir et de la commémoration est forcé pour des raisons politiques, plus violemment les conflits s’enveniment. Ce n’est que sur la base de la mise en regard sans contrainte de récits historiques différents que, peut-être, et c’est l’expérience de Sachsenhausen, peu à peu et lentement peut naître un accord sur les points communs ou divergents entre des complexes criminels différents.

 

Exemple, le 23 août 1939

 

Les conséquences problématiques de la constitution d’une culture européenne unifiée du souvenir se laissent facilement démontrer avec l’introduction du 23 août 1939 pour commémorer les victimes des dictatures et des régimes autoritaires. En choisissant le jour de la signature du pacte germano-soviétique, on a pris le risque de détacher le début de la Seconde Guerre Mondiale de ses causalités historiques pour la mettre dans une nouvelle construction de l’histoire. On donne ainsi l’impression  que la guerre et le génocide après le 1er septembre 1939 ont été le résultat d’un conflit entre les dictatures totalitaires d’un côté  et les états démocratiques de l’autre. Rien n’est plus faux que cela car la décision des National-Socialistes  d’envahir la Pologne était au plus tard dans une large mesure déjà prise en 1933 dans le cadre d’une idéologie raciste et antisémite de l’espace vital alors que l’Union soviétique tout à fait sérieusement, au moins jusqu’aux accords de Munich, négociait non seulement avec les puissances occidentales mais aussi avec la Pologne. Et finalement, la Pologne d’alors était un état autoritaire et pour une part nationaliste et antisémite, qui peu de temps auparavant, dans le sillage de la politique de conquête national-socialiste,  avait pris part à la mise à bas du seul état démocratique et libéral de l’Europe de l’est, la Tchécoslovaquie, qui au contraire de la Pologne avait accordé refuge et protection aux exilés et résistants allemands. Tout autre chose donc que le contrepoint d’une dictature totalitaire.

 

Pour éviter tout malentendu, je veux ajouter que nous devons évidemment accepter et aborder avec compréhension les expériences douloureuses  subjectivement vécues, telles qu’elles ont été représentées récemment, de manière impressionnante, dans le film primé d’Andrzej Wajda « Le Massacre de Katyn ».  Les deux envahisseurs se sont abattus sur la Pologne et en particulier sur les élites polonaises en leur infligeant la même terreur et en commettant d’innombrables crimes. C’est pour cela qu’à juste titre Alaida Assmann prévient que la compréhension a posteriori d’un contexte historique ne doit pas réduire au silence la vérité des expériences ponctuelles11.  Toutefois elle doit être mise à sa place. Les Mémoriaux ne doivent pas en rester à la présentation et à l’explication des expériences douloureuses s’ils ne veulent pas favoriser un solipsisme irréconciliable.

 

C’est ainsi que la tentative de fonder en Europe une culture antitotalitaire du souvenir par une résolution du Parlement européen prend le risque d’une décontextualisation aux conséquences encore imprévisibles au prix d’un brouillage des claires causalités historiques et des responsabilités évidentes.

 

  1. 11. [1]Alaida Assmann, Der lange Schatten der Vergangenheit. Erinnerungskultur und Geschichtspolitik, München 2006, S. 269.

 

Il apparaît maintenant clairement que les rédacteurs de la résolution pour la conscience de l’Europe ont vraiment pris au sérieux « la complète réévaluation de l’histoire de l’Europe » explicitement détaillée dans l’exposé de leurs motivations. Il ne s’agit pas seulement pour eux d’honorer les victimes de la terreur communiste – pour cette commémoration la date de la Révolution d’octobre  aurait été probablement plus appropriée – mais leur but est d’élever une théorie politique au r     ang d’un récit exemplaire contraignant et qui écarte les modèles d’explication concurrents.

 

Le combat pour les sites dans la « Guerre du souvenir »

     

C’est avec des mots sans douceur que de nombreux auteurs et scientifiques décrivent le processus de formation d’une nouvelle culture européenne du souvenir. On parle de « champs de bataille », « combats pour le sens », « lignes de démarcation », « tranchées » et même sans ambages, comme Harald Welzer de « guerre du souvenir »12. On utilise encore d’autres termes du langage militaire pour caractériser les conflits qui ont éclatés à propos de la politique européenne du souvenir. En tant que directeur de la Fondation des Mémoriaux, exposé depuis des années aux conflits et à la concurrence des souvenirs, je ne peux que m’associer au choix de ce vocabulaire. En tant que représentants des Mémoriaux et des Musées de l’Histoire nous devons nous rendre tout à fait conscient du fait que, dans ce combat pour le sens  à propos du souvenir en Europe selon la volonté de certains gouvernements, partis et groupes d’intérêt, nos lieux doivent forger une part non négligeable des armes avec lesquelles il doit être mené. Là où l’interprétation du passé devient un instrument de prise d’influence politique, des musées et des Mémoriaux sont fondés dans une rapide succession, étendus ou remaniés, pour figer dans la pierre, le béton ou le verre les interprétations respectives de l’histoire.

 

  1. Harald Welzer (Ed.), La guerre du souvenir, holocauste, collaboration et résistance dans la mémoire européenne, Francfort –sur-le-Main, 2007

 

Il est patent , qu’une grande partie de ces Musées de l’Histoire nouvellement créés comme, par exemple, la « Maison de la Terreur » fondé en 2001 à Budapest par le gouvernement conservateur-libéral de Fidesz ou le Musée du soulèvement de Varsovie construit par Kaczinski qui était alors Chef de l’Etat, veulent en première ligne travailler avec les moyens de la mise en scène et par là moins poser des questions à l’histoire que générer des réponses simples. Ce sont des musées-événements dans lesquels les visiteurs se placent eux-mêmes derrière une mitrailleuse et peuvent ainsi se glisser dans le rôle des héros qui combattent le mal.

 

A l’inverse de ce que revendiquent jusqu’à présent les Mémoriaux, ces musées veulent résolument subjuguer le public et ne laissent ainsi aucune place à un point de vue alternatif sur l’histoire ; ils ne f avorisent pas la formation d’un jugement autonome mais au contraire ne se refusent aucun moyen financier ni scénique pour communiquer aux visiteurs une vision politique préconçue et univoque du souvenir. Ce n’est pas la moindre raison pour laquelle ils sont extraordinairement populaires.

 

Dans la perspective aussi d’une pédagogie des Mémoriaux il faut s’interroger sur le processus de décontextualisation et d’effacement des différences au profit d’axiomes historiques ou même anthropologiques qui doivent embrasser les différents complexes criminels. Tout le mal de ce monde peut-il être rapporté à la différence de système entre les sociétés totalitaires et libres ? Dans ces conditions les victimes des dictatures militaires (non-totalitaires) par exemple sont-elles désormais des victimes de deuxième classe et par conséquent les morts de la Première Guerre Mondiale des victimes de troisième classe ? A quelle catégorie appartiennent les morts des massacres de Srebenica ou du Darfour ? D’ailleurs vaut-il vraiment encore la peine de se souvenir des 15000 victimes du massacre de Sétif, perpétré comme par hasard le 8 mai 1945 par l’armée française à l’encontre de la population algérienne ?

 

Il faut en fin de compte se demander dans quelle mesure les récits types, qu’il s’agisse de l’Holocaust-Education ou de la Théorie du totalitarisme, ont aujourd’hui une valeur  en tant qu’herméneutique transnationale. Quelle part dans la politique d’expansion du National-Socialisme revient à l’histoire de l’Allemagne au plus tard depuis le traumatisme insurmonté de la Première Guerre Mondiale et quelle part trouve son explication dans la structure totalitaire du système nazi ? Quelle part revient à la politique impérialiste russe dans l’asservissement de l’Europe de l’est après la fin de la Deuxième Guerre Mondiale et laquelle au système stalinien ? La force de la Théorie du totalitarisme réside plutôt à mon avis dans l’explication des processus sociaux internes des dictatures et cependant, en ce qui concerne les relations changeantes des états européens au Vingtième Siècle, les deux récits types ne me paraissent pas suffire pour les expliquer.

 

Une pomme de discorde, le Centre de l’expulsion.

 

Les débats passionnés menés en Allemagne, en Pologne et en République tchèque à propos d’un Centre de l’expulsion prouvent que la tentative de replacer la question dans un contexte européen soulève des problèmes qui sont autres mais qui n’en sont pas moins détonants. L’exigence formulée par les tenants d’une position libérale et critique, de replacer le thème dans un contexte européen, dans l’espoir de désamorcer une situation conflictuelle extraordinairement chargée d’émotion qui met sérieusement en danger les relations entre états voisins,  menace d’aboutir au résultat inverse par rapport à l’intention initiale.  Des cendres d’un discours enrichi par des histoires très diverses de déplacement de population en Europe est sorti un modèle d’explication selon lequel, dans le cadre d’un processus de « nation building », des épurations ethniques ont été pratiquées par toutes les parties. La brutale expulsion qui a concerné des millions d’Allemands après la fin de la Deuxième Guerre Mondiale apparaît moins dans cet éclairage comme une conséquence primaire des crimes nazis qui ont précédé et qui, bien plus, fournissaient, selon l’opinion de quelques historiens principalement conservateurs, le prétexte bienvenu pour pouvoir effectuer une épuration prévue de longue date, sans aucun égard envers les personnes concernées et dans les conditions les plus brutales. Naturellement dans cette explication ne manque pas non plus la référence à un jeu entre dictatures totalitaires, un appât qu’on ne manque pas d’avaler, comme on sait, dans de nombreux états d’Europe de l’est. 13

 

  1. Manfred Kittel, Horst Möller, Les décrets Benes et l’expulsion des Allemands, in Vierteljahre Hefte für Zeitgeschichte, 4/2006, pp. 541-582.

 

Les Mémoriaux et leurs devoirs : neuf principes

 

Les Mémoriaux portent une grande responsabilité. Ils doivent protéger la dignité des victimes contre tout récupération et garder ouverte l’interprétation du passé s’ils veulent plutôt susciter une réflexion sur l’histoire critique et autonome que fixer dans l’affirmative de soi-disant leçons de l’histoire.

 

C’est pourquoi à mon avis il est grandement temps pour que les Mémoriaux et les Musées de l’Histoire se mettent d’accord et s’associent sur le plan national comme international. Ce n’est qu’ensemble qu’ils peuvent résister aux tentatives d’instrumentalisation dans une Europe qui s’efforce de surmonter une globale et profonde crise d’identité par la mise en place politique, en partie par décret, de nouvelles cultures collectives du souvenir, ce qui en fait aggrave avant tout sérieusement et de manière inquiétante les querelles d’interprétation et la concurrence entre les victimes. Le cadre nécessaire à l’organisation d’une association internationale existe déjà. Le comité international des sites de mémoire (IC MEMO) fondé il y a quelques années s’est engagé en intégrant le Conseil International des Musées (ICOM) à l’égard des principes généraux, moraux et politiques, contenus dans la Charte des Nations Unies, des droits de l’homme et du citoyen en général aussi bien que de la conservation scrupuleuse de l’héritage culturel.  Le IC MEMO étend sa protection sur les différents Mémoriaux consacrés aux victimes de violences étatiques qui se trouvent aussi bien en Europe qu’en Afrique ou en Amérique. Quelles possibilités offre une telle réunion des Mémoriaux pour même influencer des décisions politiques au plus haut niveau, c’est ce que montre la discussion d’un projet de résolution déposé devant le Parlement allemand sur l’avenir des Mémoriaux. Cette offensive liée au nom d’un ancien député CDU du Parlement, ressentie par la plupart des Organisations de victimes du Nazisme et des experts des Mémoriaux comme une tentative de confondre les différents complexes de persécution, a pu être repoussée avec succès grâce à une aide internationale largement initiée par  le IC MEMO.

 

Mais les Mémoriaux n’ont pas seulement besoin d’une organisation commune et d’un meilleur réseau international.  Ils doivent au-delà se mettre d’accord sur des principes généraux de la commémoration et du souvenir. Il ne s’agit pas ici  de fixer une sorte de « Norme DIN de la mémoire », comme l’a ironiquement formulé Timothy Gardon Ash, mais plutôt de mettre en route un processus européen ou international qui engage les Mémoriaux eux-mêmes. Une sorte de Charte internationale des Mémoriaux qui s’orienterait aussi bien d’après la déclaration onusienne que d’après les principes éthiques de l’ICOM, serait à cet effet très profitable. Dans ce qui suit je veux essayer de formuler quelques principes fondamentaux qui me semblent utiles pour tenter de susciter une discussion commune entre les Mémoriaux internationaux :

 

  1. Une culture européenne commune de la culture du souvenir ne peut et ne doit pas être fixée par décret. Au regard des différentes expériences historiques les Mémoriaux prennent position pour une juxtaposition des différents impératifs du souvenir qui à la recherche d’une culture plurale de la mémoire doivent avoir place dans un dialogue et non dans une querelle d’interprétation ou même de refoulement. Une culture européenne commune, pour autant qu’elle ait réellement un sens, pourrait lentement se dégager, partant de la base, d’une multiplicité d’initiatives décentralisées.

 

  1. Même la culture plurale du souvenir nécessite un cadre de valeur positif commun. Celui-ci existe déjà dans la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen. Il n’est pas utile d’y ajouter des déductions ou même d’autres significations.

 

  1. Les Mémoriaux et les Musées de l’histoire rappellent avant tout les crimes d’état perpétrés essentiellement par une minorité.C’est pourquoi les états et les gouvernements portent une responsabilité particulière à l’égard des Mémoriaux dont ils ont l’obligation de garantir le patrimoine aussi bien qu’une indépendance étendue face aux injonctions de la politique. Simultanément ils doivent ancrer les Mémoriaux aussi largement que possible dans la société civile et bien sûr intégrer aussi les minorités.

 

  1. Les Mémoriaux modernes sont des Musées d’Histoire avec une mission humanitaire et de formation politique particulière. Ce n’est qu’en parvenant à un certain niveau internationalement reconnu de travail de qualité et d’organisation personnelle que les Mémoriaux peuvent s’imposer en face des représentants de groupes d’intérêt et de la politique.

 

  1. Au sein des Mémoriaux les décisions fondamentales concernant le contenu, la pédagogie sont prises en premier lieu sur la base d’une discussion ouverte, pluraliste et libre de tout autoritarisme avec les survivants, les représentants de groupes d’intérêt et les groupes engagés socialement. Les institutions étatiques et les sponsors privés doivent autant que possible ne pas influencer le processus d’échange d’idées et de prise de décision.

 

  1. Dans la propagation des événements historiques par les expositions, les publications et les projets pédagogiques devrait être éveillée l’empathie avec les victimes sans pour autant « activer le potentiel perfide du souvenir sous la forme de la vengeance, de la haine et du ressentiment »14.

 

  1. Les expériences historiques doivent être replacées dans le contexte historique sans que soit relativisées les souffrances particulières de chacun. Le classement des événements historiques se fait au niveau de la recherche historique moderne et se soumet aux principes scientifiques de la discursivité et des perspectives multiples. Cela implique aussi le regard porté sur les criminels qui ne doivent pas être diabolisés mais dont on doit expliquer le comportement à partir de leur idéologie, de leurs buts et de leurs motifs. A la capacité de mettre en question sa propre vision des choses appartient aussi la disposition à prendre en considération ce que Reinhardt Kosellek appelle l’« histoire négative », c’est-à-dire aussi bien les propres crimes que l’image de soi dans la représentation de l’« Autre ».

 

  1. A. Assman, L’ombre longue, p. 267

 

  1. Les Mémoriaux sur les lieux authentiquement historiques du crime ouvrent pour la formation historico-politique autant de grandes chances que de gros risques. C’est pourquoi les Mémoriaux devraient conformer leur travail de formation moins à des contenus consensuels qu’à des principes communs, comme ils ont été par exemple formulés en 1976 dans la convention de Beutelsbach. Ceux-ci sont essentiellement l’interdiction de subjuguer et d’endoctriner, la sauvegarde de la position de sujet de chacun de même que la consigne de la controverse.

 

  1. Les Mémoriaux et les Musées d’Histoire courent le risque de refléter les courants temporaires de l’esprit du temps et ainsi de fixer moins le déroulement historique que les interprétations présentes du passé. C’est pourquoi ils devraient toujours réfléchir de manière critique sur leur propre histoire prise dans une histoire de la culture respective du souvenir.

 

Le « Testament » des survivants

 

Le jour des Victimes du National-Socialisme, le 27 janvier de cette année, les présidents des Comités internationaux d’Auschwitz, Bergen- Belsen, Buchenwald, Dachau, Flossenbürg, Mittelbau-Dora, Neuengamme, Ravensbrück et Sachsenhausen ont remis au Président de la République fédérale allemande une déclaration commune. Dans le „Testament des survivants des Camps de concentration“ comme ils ont appelé eux-mêmes la déclaration, se sont fondus non seulement les souvenirs des terribles années de leur internement mais aussi leurs amères et fréquentes expériences de la mémoire européenne des incomparables crimes du régime nazi.  Ils y nomment très précisément  de leur point de vue les devoirs et les exigences d’une culture européenne du souvenir : « Mais l’Europe a aussi son devoir : au lieu d’imposer nos idéaux de  démocratie, de paix, de tolérance, d’autodétermination et de droits humains, l’histoire n’est pas rarement utilisée pour semer la zizanie entre les hommes, les groupes et les peuples. Nous nous élevons contre le fait que l’on se renvoie la faute, que l’on établisse une hiérarchie des expériences de la souffrance et que l’on mêle entre elles les phases de l’histoire. C’est pourquoi nous confirmons l’appel prononcé par l’ancienne Présidente du Parlement européen Simone Veil devant le Parlement allemand en 2004 : ‘ L‘Europe devrait reconnaître son passé commun comme un tout et l’assumer avec toutes ses lumières et ses ombres, être au clair avec son propre passé pour être au clair aussi avec ses voisins’ ».15

 

 

 

 

 

 

  1. Le « Testament » a fait l’objet de plusieurs publications et trouve sur le site Internet de la plupart des Mémoriaux des Camps de concentration. Le Texte est imprimé par exemple dans Contre l’oubli, pour la démocratie, mai 2009, pp. 14-19, ici p. 18.